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AFP
"Mesure gadget", initiative "largement insuffisante", ou mauvaises cibles... Pour les associations féministes, s'il est toujours une bonne chose d'évoquer les violences sexuelles et sexistes, la campagne lancée ce mardi par le ministère de l'Intérieur contre le harcèlement de rue, qui se traduira par la distribution, par les forces de l'ordre, de 5 millions de flyers, n'est pas une réponse suffisante à la problématique que rencontrent les femmes.
Sur BFMTV, Violaine de Filippis, avocate et porte-parole de l'association Osez le féminisme juge qu'il s'agit d'une "mesure gadget largement insuffisante" qui "ne répond pas aux attentes des associations" et "n'améliorera pas la prise en charge des victimes".
Elle dénonce même "une certaine ironie, puisque ces tracts vont être distribués par des officiers de police qui, eux-mêmes, ne sont souvent pas formés aux violences conjugales". Pour Diariata N'Diaye, directrice de l'association Resonantes et membre du Haut conseil à l'égalité, il faut également cesser de demander "aux victimes de ces différentes violences d'agir", mais de faire appel aux témoins de ces situations, afin qu'ils se "positionnent".
Des formations, comme "Stand Up", qui se fait en ligne, peut permettre à tout un chacun d'apprendre les bons gestes. Il s'agit des "5D": distraire, déléguer (à d'autres témoins), dialoguer, documenter et diriger.
Des flyers adressés aux mauvaises personnes
Quant à l'initiative du gouvernement, et à cette distribution de flyers permettant d'informer les hommes comme les femmes et de créer des moments de dialogue entre les forces de l'ordre et les passants sur ce sujet, Diariata N'Diaye estime que "toute occasion de parler des violences dans l'espace privé et l'espace public est bonne à prendre".
Mais elle estime que ces flyers ne ciblent pas la bonne personne. "Il aurait été plus pertinent de les adresser aux hommes, parce qu'on sait qu'en majorité, ce sont les hommes qui harcèlent les femmes dans l'espace public", a-t-elle déclaré sur le plateau de BFMTV.
"Je trouve assez problématique de distribuer ces flyers aux femmes, tout simplement parce qu'elles savent déjà qu'elles peuvent appeler la police, elles se débrouillent comme elles peuvent quand elles sont confrontées à ces situations de violence", a-t-elle ajouté.
Diariata N'Diaye a par ailleurs soulevé la question des preuves, qui fait parfois défaut lorsqu'une victime dépose plainte. "Il aurait été plus pertinent de leur proposer des choses concrètes, comme la formation Stand Up ou d'installer l'application App-Elles", selon elle.
Les flyers du gouvernement renvoient par ailleurs à une application, "Ma sécurité", permettant aux victimes comme aux témoins d'échanger 24h sur 24 avec un membre des forces de l'ordre et d'envoyer des photos. L'association "StopHarcèlementDeRue" a quant à elle dénoncé sur Twitter l'intitulé du flyers, visant uniquement "la sécurité des femmes dans l'espace public", ce qui "occulte les violences subies dans l’espace public par d’autres personnes minorisées comme par exemple les personnes (en situation de handicap), racisées, LGBTI+, ou encore grosses".
Elle regrette aussi un flyer qui s’adresse aux victimes et aux témoins, "mais pas aux agresseurs", et aurait souhaité y voir figurer "un message responsabilisant" pour ces derniers.
Se pose également, selon l'association, la question de la formation du grand public à cette question, afin notamment d'être en capacité de reconnaître une agression. "Toutes les agressions ne sont pas forcément spectaculaires, et souvent les personnes non-concernées ne savent pas reconnaître un cas de harcèlement de rue", selon StopHarcèlementDeRue.
Sensibiliser les professionnels
Pour Violaine de Filippis, cette campagne de sensibilisation pourrait toutefois exister en parallèle d'autres mesures, comme une sensibilisation des professionnels amenés à travailler avec les victimes. Elle dénonce notamment les "conditions des dépôts de plainte", et affirme que les femmes victimes "ont raison d'avoir peur".
"Le dépôt de plainte, c'est une catastrophe. Quand vous êtes reçue, il n'y a absolument pas de confidentialité, quand vous déposez plainte, on entre et on sort dans le bureau comme dans un moulin, il y a presque de l'irrespect parfois", dénonce-t-elle.
Elle regrette aussi des "questions déplacées et inadéquates" qui peuvent être posées et appelle à ce que "la police prenne en considération le fait que la police n'est pas formée elle-même", avant "d'informer les citoyennes et les citoyens". L'association appelle donc à davantage de formation des professionnels des forces de l'ordre, de la justice mais aussi du corps médical, et à une évolution notable du traitement judiciaire des plaintes.
"Le taux de classement sans suite des plaintes démontre que rien n'évolue dans le bon sens", selon Violaine de Filippis, qui dénonce que "moins de 1% des viols sont condamnés et la plupart des plaintes pour violences conjugales sont classées sans suite".
D'autres leviers sont mis en place pour sécuriser les femmes dans l'espace public, notamment par les associations. C'est le cas de l'application App-Elles, qui permet selon Diariata N'Diaye d'"enclencher des alertes d'appel à l'aide" et de mettre en relation les victimes avec des personnes de confiance qui bénéficient de leur position GPS.
Source: BFMTV
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